Un rendez-vous placé sous le signe de la création, c’est ce que promettent les Beaux-Arts de Paris et Mondes nouveaux, en lançant du 11 au 16 avril, un événement qui va mêler, dans plusieurs espaces de l'établissement, performances dansées, concerts, spectacles de marionnettes, ateliers publics, débats, lectures, expositions ou projections de films...
La création sous toutes ses formes, en somme, y compris celles qu’on ne soupçonne pas, réalisées par une vingtaine d’artistes lauréats de Mondes nouveaux et les étudiants des Beaux-Arts de Paris qui, depuis le début de l’année, partagent leurs visions, croisent leurs pratiques et transgressent résolument les frontières artistiques lors d’ateliers menés en compagnie des professeurs de l’établissement.
De ces temps d’échanges vont naître des créations originales, qui seront présentées aux côtés d’une centaine d’œuvres d’artistes lauréats de Mondes nouveaux, un dispositif lancé en juin 2021 dans le cadre du plan France Relance. Alexia Fabre, directrice de l’établissement et Bernard Blistène, président du comité artistique de Mondes nouveaux, reviennent sur ce « rendez-vous inédit ».
Vous lancez ce partenariat inédit entre Mondes nouveaux et les Beaux-Arts de Paris. Comment est née l’idée de cette association ?
Alexia Fabre : Au printemps dernier, Bernard Blistène et son équipe sont venus nous trouver pour nous proposer une implantation, voire un enracinement de Mondes Nouveaux aux Beaux-Arts de Paris. Cette proposition nous a semblé extrêmement réjouissante et porteuse de sens puisque les points de convergence sont nombreux entre nous.
Tout d’abord il y a cet appel à la jeune création avec d’un côté les artistes de Mondes Nouveaux et de l’autre nos étudiants. Il y a également l’implantation dans un monde réinventé qui est une des bases de Mondes Nouveaux et qui est aussi quelque chose que nous cultivons aux Beaux-Arts. Nous préparons les étudiants à ce qui les attendent mais aussi le monde à l’arrivée de ces artistes.
Ensuite, il y a cette confiance en la création qui nous habite collectivement. Nous savons l’un comme l’autre que le temps long est nécessaire pour transmettre le processus de création, l’accompagner dans la durée. Et puis enfin, il y a cette hybridation entre les genres qui constitue l’un des principes de Mondes nouveaux. C’est quelque chose qui nous est cher à l’École puisque nous procédons par ateliers avec des disciplines, des artistes chefs d’atelier qui enseignent et qui eux-mêmes invitent d’autres artistes. Notre enseignement n’est pas normatif : les étudiants peuvent se fabriquer un chemin particulier en naviguant d’un atelier, d’une pratique, d’une discipline à l’autre.
Bernard Blistène : L’idée était que les artistes professionnels puissent rencontrer des artistes en cours de formation. Et les Beaux-Arts de Paris, fleuron de l’enseignement supérieur Culture qui symbolise la transmission, était vraiment le lieu idéal pour réaliser cette ambition. La frontière entre le moment où vous êtes étudiant et celui où vous entrez dans la vie active est ténue. Si vous voulez étudier quelque chose de ce passage, le mieux comprendre, il faut interroger à la fois ceux qui sont encore dans la vie étudiante et qui vont bientôt entrer dans la vie professionnelle et réciproquement pour saisir ce que l’on devient à l’instant où l’on se confronte à la réalité de l’écosystème artistique dans toute sa complexité.
Qu’est-ce qui peut, selon vous, émaner de ces rencontres, aussi bien du point de vue de la création que de l’enseignement artistique ?
A.F. : Ces rencontres ouvrent des perspectives inconnues, des horizons inexplorés. Ce contact avec des artistes extérieurs représente une opportunité car il donne lieu à des conversations qui ne sont pas bridées, pas normées. Les ateliers sont très ouverts et mettent en relation des univers différents entre les invités, les chefs d’ateliers et les étudiants. Ce qui me semble très important, c’est que les étudiants puissent inventer ce dont ils vont se servir et qu’ils ne restent pas sur des dispositifs classiques qui, parfois, les contraignent.
B.B. : Au cœur de ces histoires, il y a aussi des professeurs qui, aux Beaux-Arts de Paris, sont aussi des artistes. Je trouvais tout à fait passionnant qu’ils puissent être l’interface pour que ce dialogue se construise, d’autant plus que nous avons mis en évidence, avec Mondes nouveaux, la pluridisciplinarité et l’extrême diversité des pratiques, que l’on voit aux Beaux-Arts avec des ateliers et des cours dans des domaines comme le spectacle vivant ou l’écriture. On retrouve donc ici l’amplitude sur laquelle l’équipe de Mondes nouveaux a construit le projet et c’est évidemment quelque chose qu’il me semblait essentiel de prendre en compte.
À côté de ces œuvres originales seront présentées une centaine d’œuvres issues de Mondes nouveaux, auparavant disséminées sur tout le territoire. Quel est l’intérêt aujourd’hui de les regrouper ?
B.B. : Lors de la création de Mondes Nouveaux, l’objectif était de s’immiscer, de tisser le dialogue dans les territoires les plus divers, tant avec les lieux que nous offrait le Centre des Monuments nationaux qu’avec ceux du Conservatoire du Littoral. Mais nous avions aussi conscience qu’il fallait trouver un lieu où l’on s’interroge sur ce qui avait été réalisé. Nous savions par ailleurs que, pour des raisons géographiques puisque nous avions également mené l’enquête dans les territoires d’outre-mer, les visiteurs n’avaient pas pu aller d’un endroit à l’autre pour voir un projet, d’autant plus que certains étaient éphémères – comme ceux touchant au spectacle vivant ou aux performances. Ce que j’aimais aussi, c’était l’idée de voir dialoguer ces projets d’horizons et de disciplines différentes et de les regarder se confronter à l’École, aux étudiants et à leurs professeurs.
Le résultat de cette collaboration sera présenté au public lors d’un grand rendez-vous de la création en avril. À quoi le public pourra-t-il s’attendre ?
B.B. : D’abord, j’aimerais qu’il s’imprègne de ce qu’il verra et qu’il revienne, qu’il déambule et qu’il ait des expériences multiples dans ces lieux magnifiques et si propices à la découverte. On n’aborde pas la chapelle de l’école et ses moulages ô combien emblématiques de la même manière qu’un lieu de rencontres comme la cour du mûrier ou de conférences comme l’auditorium. Caroline Naphegyi à qui nous avons demandé de fédérer le projet, a voulu proposer une expérience qui se veut ouverte et j’aimerais que cette expérience soit celle du sens et des sens.
A.F. : On peut s’attendre à des surprises et à des formats qui sortent de ce qu’on connaît. Ce rendez-vous va rendre justice à la création et aux différents chemins qu’elle prend aujourd’hui avec des durées différentes et l’hospitalité d’autres formes. Je trouve assez belle l’idée que, au cœur d’une École où chaque étudiant peut se fabriquer un chemin différent avec des ateliers où il découvre et associe les pratiques, on ait ces formats différents qui mêlent forme plastique, vocale ou musicale.
On aura des temporalités différentes avec des instants à saisir et des choses qui restent. On parlait tout à l’heure d’hybridation, de conversation, de mélanges, de métissages et je pense que ce projet est très fort pour cela. Il risque d’y avoir des surprises mais si une école d’art ne permet pas cela, ce serait très inquiétant !
Retrouvez ici l'intégralité de la programmation du rendez-vous artistique Mondes nouveaux x Beaux-Arts de Paris
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