Des femmes lisent des auteurs femmes au Panthéon, le monument de la Patrie reconnaissante aux « grands hommes ». Comme un symbole?
Regardez le faible nombre de femmes présentes à la tête d'institutions culturelles. Seules 14% des Centres dramatiques nationaux sont dirigés par des femmes. Les chefs d'orchestres ? Seuls trois ou quatre sont des femmes. Tant qu'on n'aura pas gagné l'égalité entre hommes et femmes, il n'y aura pas de geste mineur pour la faire évoluer. Il n'y a que la volonté qui peut nous faire avancer sur ce chemin. C'est un combat.
Où il faut jouer des coudes?
Il faut des actes symboliques forts. Manifester le désir de transférer les cendres d'une femme au Panthéon en est un. Les femmes sont trop souvent perçues comme un faire-valoir indispensable au talent ou à la force des hommes. Clara pour Schumann, Joséphine pour Napoléon. J'ai choisi de commencer ce cycle de lectures d'auteurs femmes avec George Sand, qui a emprunté un prénom masculin, revêtu une redingote pour se faire une place dans le Paris romantique du milieu du XIXe siècle, et faire entendre sa voix, faire reconnaître son talent. Une femme à l'époque n'avait pas le droit de cité. Elle est écrivain, ardente défenseure du monde rural, amoureuse, passionnée, avec des engagements forts et une conscience politique. La liste de femmes courageuses est longue. Et pourtant, on les désigne encore par le « sexe faible ».
Le regard d'une femme metteur en scène change-t-il au théâtre?
Imagineriez-vous poser cette question à un homme ? Où est la part de féminité chez Patrice Chéreau, ou chez Robert Lepage? Elle est là, comme en chaque être. Et le talent lui n'a pas de sexe. Il est unique. Mais il est vrai que nous sommes peu nombreuses à occuper des postes de responsabilité et de pouvoir. Première administratrice de la Comédie-Française, je veille à intégrer des auteurs et metteurs en scène femmes dans le répertoire : Naomi Wallace, Lilo Baur, Anne-Laure Liégois... Je choisis des pièces avec de beaux rôles féminins, où les femmes n'incarnent pas seulement des servantes comme chez Molière ou des reines chez Shakespeare, mais où elles sont aussi présentes que les hommes, des personnages principaux comme dans La Trilogie de la Villégiature, de Carlo Goldoni, ou Andromaque de Racine. De même je veille à maintenir un équilibre dans la troupe entre le nombre d'actrices et d'acteurs. Être une femme est naturel. La parité devrait l’être, au titre de l'égalité.
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