Contexte
La ville de Montluçon, dans l’Allier, se caractérise aujourd’hui par un bel étagement urbain, témoin des différentes époques d’aménagement. Tout d’abord les immeubles périphériques, propres à la reconstruction d’après guerre, cernent par leur silhouette à grande hauteur, l’agglomération jusqu’aux berges du Cher.
D’ici, à qui y prête attention, comme un bond dans l’histoire, de belles perspectives s’ouvrent sur la butte féodale qui domine la cité. En son pied, les pentes ascendantes aménagées en partie par des jardins suspendus, aboutissent sur le rocher en belvédère, piédestal du château des Ducs de Bourbon.
Cette silhouette ancestrale, paisible, quelque peu endormie, a été perturbée depuis peu par l’implantation du MuPoP, aux courbes singulières propres à une architecture contemporaine affirmée.
Faisant écho au musée de la vielle qui existait entre 1960 et 1970, le musée des musiques populaires situé au sein du Site patrimonial remarquable de Montluçon, a ouvert ses portes le jour de la fête de la musique 2013. Fortement soutenu par le ministère de la Culture, ce musée, qui possède l’appellation Musée de France, abrite une collection importante d’instruments, d’objets, de documents visuels et de témoignages sur l’évolution des différents genres musicaux. Cette collection permanente est enrichie annuellement par des expositions aux thèmes aussi variés qu’originaux.
Le projet : dialogue entre patrimoine et modernité
Le concours a été gagné quelques années plus tôt par le groupement réunissant l’architecte Philippe Tixier (Atelier 4), l’architecte du patrimoine et ingénieur Philippe Morel, ainsi que le scénographe Pascal Payeur. Ensemble, ils ont conçu un projet sur la base du programme scientifique pluridisciplinaire souhaité et porté par son directeur et conservateur, Eric Bourgougnon.
L’intégration remarquable de ce projet aux différentes échelles de la ville constitue une des réussites du musée. En effet, le maire Daniel Dugléry,souhaitait un signal visible de loin, notamment depuis le château de Bien-Assis autre promontoire historique de la ville situé en proche périphérie.
Le parti d’un dialogue entre patrimoine et modernité est venu en réponse à l’exigence formulée par l’architecte des bâtiments de France d’adopter un parti contemporain.
L’architecture répond à de nombreuses contraintes : avec l’impératif technique d’assurer une bonne conservation de la riche collection, instruments, costumes, mais aussi l’insertion du nouvel ensemble dans un parcellaire médiéval très contraint. Prenant place dans l’ancien hôtel particulier Charnisay (1727), et dans l’immeuble Méchain (ancien magasin de confection construit en 1921) au cœur de la cité médiévale, l’implantation du musée surplombant le jardin Wilson, protégés au titre des sites classés, crée un réel cheminement entre les deux propriétés anciennement ceintes dans leurs murs de clôture.
Ces accès occasionnent aujourd’hui une transition entre ville haute médiévale et ville basse depuis la succession de terrasses arborées, de pelouses, de décors floraux et de bassins.
Lignes de force du projet
D’un point de vue plastique, l’architecture s’affirme par des volumes d’une enveloppe en métal strié et de couleur bronze patiné venant en recouvrement du parallélépipède en béton clair. Le métal ajouré absorbe ainsi les ombres et cette coque polygonale, réfléchissant de façon douce et aléatoire la lumière solaire selon ses faces, crée une présence subtile car moins prégnante que celle de l’église Notre-Dame, monument historique classé aux angles saillants d’un clocher encore dominant. La géométrie « aléatoire » de cette coque haute, qui permet avant tout de masquer les dispositifs de ventilation très volumineux sur le toit du musée, s’insère en continuité des toitures caractérisées par la petite tuile du vieux Montluçon.
Dans les rues étroites, au pied de l’édifice, le caractère contemporain du métal joue, avec la minéralité des façades traditionnelles. La géométrie cubiste, à facette, crée l’événement face aux immeubles anciens. Ici, la rue Notre Dame dévoile un passage entre l’église et l’enveloppe vers un parvis en belvédère des jardins, là, une entrée s’ouvre à nous sous la coque métallique. Là encore, au sein des vides existants entre les bâtiments du musée, un patio forme un accès vers les rues anciennes et vers les différents lieux du musée. La balade de coins de rue, permet ainsi d’apprécier des singularités anciennes et modernes, désormais synonymes.
A l’intérieur du musée, entre l’Hôtel de Charnisay, restauré dans ses dispositions d’origine, et l’immeuble Méchain, fortement démoli à l’exception de la façade donnant sur la rue Notre Dame, la distribution reprend le principe d’organisation commerciale en balcons du magasin moderne. Elle permet des fenêtres vers la ville depuis des baies créées sur trois façades, ouvrant de nouvelles directions au regard, au sein des volumes intérieurs redistribués.
Le MuPoP montre ainsi un bel exemple d’une architecture contemporaine affirmée venant dialoguer par effet de miroir teinté avec le site patrimonial remarquable de Montluçon.
Jean-Marie Russias, Architecte des Bâtiments de France, avec la collaboration de Paul Girard adjoint à l'UDAP03
Fiche projet
Maître d'ouvrage : Ville de Montluçon
Maître d'oeuvre : Groupement GFC construction / Atelier 4 / Atelier Scénographie P.Payeur
Surface : 3 904 m²
Coût : 10 100 000 € HT
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